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CETA : les 28 signent les oreilles et les yeux fermés

samedi 29 octobre 2016

Après quelques jours d’intenses négociations avec les régions belges qui refusaient d’autoriser leur gouvernement fédéral à signer, la Commission européenne et les États membres ont décidé, par procédure écrite, de valider en urgence, dans la soirée de vendredi, la signature du CETA. Au scandale des pressions sur des élus soucieux des impacts d’un traité dangereux pour la santé, l’environnement, l’emploi et la démocratie, succède celui de l’approbation en catimini et en urgence de nouveaux textes dont la portée et la validité juridiques restent complètement incertaines.

Pour Murielle Guilbert de l’Union Syndicale Solidaires : « Après nous avoir expliqué pendant des mois que le CETA était un accord modèle, la Commission européenne et ses autres promoteurs ont accepté d’ajouter, en trois semaines, une déclaration interprétative commune entre l’UE et le Canada, revisée plusieurs fois, enrichie par la suite de déclarations unilatérales de l’UE et de ses États membres compilées en annexe de la décision du Conseil, le tout n’ayant presque aucune efficacité juridique. Tout a été fait à marche forcée, afin de hâter la conclusion d’un processus dont la rapidité n’a aucune justification, d’autant moins au vu des controverses qu’il a suscitées ces dernières semaines ».

Nicolas Roux, des Amis de la Terre, confirme : « La Commission et le gouvernement n’ont eu de cesse de communiquer sur la nécessité et l’urgence impérieuses du traité, mais personne n’a pris la peine d’expliquer pourquoi il fallait le signer si rapidement, alors même qu’un débat démocratique légitime s’installait. Ce passage en force aura des effets dévastateurs sur la confiance des citoyens dans les institutions européennes, au moment où tout devrait être fait pour renforcer leur légitimité. C’est de l’inconscience ».

Karine Jacquemart, directrice de Foodwatch, renchérit : « Comment le gouvernement français, complètement silencieux sur le sujet depuis 8 jours, peut-il approuver la signature du CETA et des nouveaux textes qui l’accompagnent alors que personne, et surtout pas le Parlement, n’a eu le temps d’en débattre ? Soit ces textes ne changent rien et cela implique que la Commission s’est employée à flouer les régions belges qui se sont battues pour faire valoir des considérations démocratiques de base, soit le paquet de nouveaux textes a une portée réelle et change la donne, dans ce cas il aurait été légitime d’en débattre avec les parlementaires et la société civile qui interpellent le gouvernement depuis des semaines. Ce passage en force est d’autant plus inexplicable que le CETA ne respecte même pas la Constitution française ».

Pour Jean Michel Coulomb, de Attac, « il est complètement ahurissant que la Commission et 27 États membres, dont la France, s’accordent en pleine nuit pour signer dans la précipitation un traité sur la légalité duquel la Belgique a prévenu qu’elle saisirait la Cour de Justice de l’UE : s’ils acceptent que les interrogations belges sur la compatibilité du système de protection des investisseurs avec le droit européen sont légitimes, ils devraient au moins attendre que la CJUE rende son avis. Au lieu de ça, ils s’empressent de signer et de soumettre au Parlement européen un texte potentiellement illégal ! ».

Andrée Desvaux du Collectif Roosevelt, alerte : « La Commission et les grands États membres tentent la politique du fait accompli. Car en signant et en cherchant à faire ratifier rapidement au Parlement européen le texte, ses promoteurs savent que son application provisoire débuterait dès février. Celle-ci ne concernerait pas la protection des investisseurs, mais presque toutes les autres mesures du traité, largement soutenues par les lobbies financiers et industriels, pourraient être mises en œuvre ! Les ratifications nationales, qui pourraient bloquer le traité, n’interviendront que plus tard, si ce n’est peut-être jamais ».

Pour Amélie Canonne, de l’AITEC : « C’est une chance de plus de restaurer la crédibilité de l’UE qui s’évanouira demain matin à la signature du traité. Et c’est une déception amère pour tou-te-s les citoyen-enne-s qui s’emploient à empêcher l’Europe de disparaître en tentant de transformer son projet ».