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Le Traité sur la charte de l’énergie, qui protège les pollueurs ne peut pas être modernisé ! Il faut en sortir

jeudi 17 décembre 2020

Le trop peu connu Traité sur la charte de l’énergie (TCE) se trouve au cœur d’une controverse publique majeure dont l’issue aura des effets importants sur l’ambition des politiques climatiques en Europe et ailleurs. Alors que les critiques publiques venant de la société civile, mais aussi de parlementaires, se font toujours plus nombreuses et plus fortes pour dénoncer le rôle néfaste que joue le TCE, ses promoteurs veulent le sauver à travers un processus de modernisation qui vient de débuter mais qui n’offre aucune garantie d’aboutir dans de brefs délais. Alors que des réunions du TCE se tiennent ces 15, 16 et 17 décembre, les organisations de la société civile rappellent qu’au nom de l’urgence climatique, il est temps d’en sortir, plutôt que chercher à moderniser un traité qui ne peut l’être !

Le Traité sur la charte de l’énergie est un traité international qui permet à une entreprise allemande, Uniper de menacer d’attaquer les Pays-Bas pour leur décision de fermer des centrales à charbon, à une entreprise britannique Rockhopper de s’en prendre à l’Italie à la suite de son moratoire sur les forages offshore, à une entreprise canadienne, Vermilion, de faire pression pour rendre la loi Hulot sur les hydrocarbures inoffensive, et bien d’autres encore. C’est une une arme juridique fréquemment utilisée par les investisseurs et entreprises du secteur des énergies fossiles pour protéger leurs intérêts au détriment de l’intérêt général.

Cela fait plusieurs années que les organisations de la société civile appellent l’Union européenne et ses États-membres à en sortir. C’est possible : l’Italie l’a fait en 2016. Plus récemment, en septembre 2019 et en décembre 2019, nos organisations ont formalisé cette demande urgente dans une lettre ouverte qui a réuni 280 organisations : il est temps de mettre fin aux protections dont dispose le secteur des énergies fossiles et de désarmer ce Traité nocif.

Face à ces critiques, les promoteurs du Traité affirment que le processus de modernisation qui vient de débuter permettra de remédier aux problèmes soulevés par la version actuelle du traité. Ce n’est pas vrai comme le montre une nouvelle publication de CEO, TNI et Porwer Shift, co-publiée en France par l’Aitec et Attac France : ce processus de modernisation ne permettra pas de dompter le TCE et n’apportera tout au plus que des changements cosmétiques.

D’autre part, un rapport du Secrétariat de la Charte de l’énergie montre que le processus de modernisation n’a rien donné cette année et que des divergences majeures subsistent entre les parties. Ce qui rend très improbable une modernisation du Traité dans des délais acceptables. Après trois cycles de négociations en 2020, l’UE est incapable de présenter des résultats concrets sur les deux objectifs qu’elle s’est donnée : aligner le TCE sur l’accord de Paris et restructurer le mécanisme d’arbitrage. Les autres membres du TCE n’en veulent pas. Ce n’est donc pas au cours des 4 prochaines réunions de négociations, en 2021, que la situation va radicalement changer.

L’alternative est connue : l’UE et ses États-membres doivent se retirer collectivement du TCE tout en se mettant d’accord sur un traité conjoint pour interdire à leurs investisseurs respectifs d’utiliser le TCE contre un autre pays européen. Ce serait le moyen le plus simple et le plus rapide pour désarmer le TCE de ces effets les plus nocifs. Le temps n’est plus celui de menacer de quitter le TCE, comme le laissent entendre quelques États-membres de l’UE, mais de remplacer cette menace par une action collective d’ampleur qui renverrait cet Traité dans les poubelles de l’Histoire.

Pour aller plus loin :